Par Olivier Tosseri
Publié le 2 juil. 2020 à 11h30
La
 mafia ne prend jamais de vacances. Encore moins en pleine crise 
économique. Et celle provoquée par la pandémie de Covid-19 a mis à 
genoux le secteur hôtelier italien qui, selon sa fédération 
professionnelle, devrait perdre cette année pas loin de 40 % de son 
chiffre d'affaires, selon les estimations les plus optimistes. D'autres 
évoquent un effondrement jusqu'à plus de 70 %.
A
 l'issue de la période de confinement, seuls 40 % des établissements ont
 rouvert, tandis qu'à Rome 9 sur 10 sont toujours porte close. Au coeur 
de la saison estivale, en août, 21 % des hôtels devraient rester fermés,
 faute de touristes étrangers dans la péninsule, notamment chinois, américains et russes, malgré la réouverture des frontières.
Véritable aubaine
Une
 véritable aubaine pour les organisations criminelles, y compris celles 
d'Europe de l'Est, qui n'ont que l'embarras du choix pour investir dans 
un secteur qui compte 33.000 hôtels, pour un total de plus de 1 million 
de chambres. Selon le procureur antimafia Nicola Gratteri, ces mafias 
peuvent ainsi recycler l'argent sale, y développer leurs activités liées
 à la drogue et à la prostitution, donner à certains de ses membres un 
« emploi respectable » ou, tout simplement, diversifier leurs sources de
 revenus. Sans oublier la possibilité de bénéficier des milliards 
d'euros d'aides européennes promis pour soutenir les entreprises en 
difficulté.
La
 criminalité organisée multiplie donc les contacts avec des hôteliers 
souvent endettés, sans clients, face à des banques sourdes à leurs 
demandes de prêts et toujours dans l'attente de l'aide du gouvernement. 
Des « offres prédatrices » lancées par des intermédiaires de la Mafia 
sicilienne, de la Ndrangheta (la mafia calabraise) ou de la Camorra 
napolitaine.
Changements de propriété suspects
L'alarme
 a été lancée sur la côte romagnole par le préfet de Rimini, Alessandra 
Camporota : « les mafias vont profiter du virus pour s'infiltrer, mais 
nous serons attentifs aux changements de propriété suspects ». Or, 
ceux-ci se sont multipliés de la Sicile à la Vénétie en passant par des 
régions jusqu'alors plutôt épargnées, comme l'Ombrie. Une centaine a été
 signalée par la fédération Federalberghi et passées au crible par la police financière.
Le
 ministère de l'Intérieur exige de tous les préfets la plus extrême 
vigilance. « Cela concerne surtout les petites structures qui 
constituent l'écrasante majorité du parc hôtelier », explique Raffaello 
Zanini, un consultant auprès des investisseurs. A part quelques grands 
établissements, l'Italie compte surtout de petites entreprises 
familiales très peu capitalisées et endettées.
Nombre
 de crédits non performants (NPL, pour Non Performing Loans) dont les 
banques italiennes ont tant de mal à se débarrasser concernent 
d'ailleurs des hôtels. Leurs propriétaires, souvent âgés, redoutent non 
seulement la perte du bien immobilier mais aussi la disparition de leur 
source de revenus. « Alors quand on vient leur proposer de reprendre une
 activité qui est sur le point de faire faillite en s'occupant de leurs 
dettes et en leur laissant la gestion, la tentation est grande », 
remarque cet expert.
 
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