sabato 11 luglio 2020

Les Echos - L'hôtellerie italienne est une proie facile pour les mafias




Publié le 2 juil. 2020 à 11h30
La mafia ne prend jamais de vacances. Encore moins en pleine crise économique. Et celle provoquée par la pandémie de Covid-19 a mis à genoux le secteur hôtelier italien qui, selon sa fédération professionnelle, devrait perdre cette année pas loin de 40 % de son chiffre d'affaires, selon les estimations les plus optimistes. D'autres évoquent un effondrement jusqu'à plus de 70 %.
A l'issue de la période de confinement, seuls 40 % des établissements ont rouvert, tandis qu'à Rome 9 sur 10 sont toujours porte close. Au coeur de la saison estivale, en août, 21 % des hôtels devraient rester fermés, faute de touristes étrangers dans la péninsule, notamment chinois, américains et russes, malgré la réouverture des frontières.

Véritable aubaine

Une véritable aubaine pour les organisations criminelles, y compris celles d'Europe de l'Est, qui n'ont que l'embarras du choix pour investir dans un secteur qui compte 33.000 hôtels, pour un total de plus de 1 million de chambres. Selon le procureur antimafia Nicola Gratteri, ces mafias peuvent ainsi recycler l'argent sale, y développer leurs activités liées à la drogue et à la prostitution, donner à certains de ses membres un « emploi respectable » ou, tout simplement, diversifier leurs sources de revenus. Sans oublier la possibilité de bénéficier des milliards d'euros d'aides européennes promis pour soutenir les entreprises en difficulté.
La criminalité organisée multiplie donc les contacts avec des hôteliers souvent endettés, sans clients, face à des banques sourdes à leurs demandes de prêts et toujours dans l'attente de l'aide du gouvernement. Des « offres prédatrices » lancées par des intermédiaires de la Mafia sicilienne, de la Ndrangheta (la mafia calabraise) ou de la Camorra napolitaine.

Changements de propriété suspects

L'alarme a été lancée sur la côte romagnole par le préfet de Rimini, Alessandra Camporota : « les mafias vont profiter du virus pour s'infiltrer, mais nous serons attentifs aux changements de propriété suspects ». Or, ceux-ci se sont multipliés de la Sicile à la Vénétie en passant par des régions jusqu'alors plutôt épargnées, comme l'Ombrie. Une centaine a été signalée par la fédération Federalberghi et passées au crible par la police financière.
Le ministère de l'Intérieur exige de tous les préfets la plus extrême vigilance. « Cela concerne surtout les petites structures qui constituent l'écrasante majorité du parc hôtelier », explique Raffaello Zanini, un consultant auprès des investisseurs. A part quelques grands établissements, l'Italie compte surtout de petites entreprises familiales très peu capitalisées et endettées.
Nombre de crédits non performants (NPL, pour Non Performing Loans) dont les banques italiennes ont tant de mal à se débarrasser concernent d'ailleurs des hôtels. Leurs propriétaires, souvent âgés, redoutent non seulement la perte du bien immobilier mais aussi la disparition de leur source de revenus. « Alors quand on vient leur proposer de reprendre une activité qui est sur le point de faire faillite en s'occupant de leurs dettes et en leur laissant la gestion, la tentation est grande », remarque cet expert.


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